Après le non des députés aux accords de prêt

Publié le par Koumondji Arnaud

Yayi prend de nouvelles ordonnances

Refus des députés

Comme on pouvait s’en douter, les députés de la 5ème législature en rejetant les deux projets de loi portant autorisation de ratification de deux accords de prêts, ont dressé royalement le tapis rouge au chef de l’Etat pour prendre une nouvelle ordonnance. En agissant ainsi, les élus du peuple ont voulu cadenasser l’un des robinets financiers du gouvernement qui depuis quelques années, entretient un important bétail électoral que constituent les femmes. Mais la réaction du chef de l’Exécutif ne s’est  pas faite  attendre. En effet, le vendredi dernier, Boni Yayi a dû prendre une ordonnance pour autoriser lesdits accords de prêts. A première vue, le chef de l’Etat, vient de sauver des milliers de femmes de la misère. Mais plusieurs interrogations crèvent l’œil dans ce nouveau duel à distance que se livrent le pouvoir exécutif et l’opposition parlementaire. Pourquoi les députés ont-ils rejeté ces deux projets ? Est-il vraiment opportun de prendre une ordonnance ? Quelle sera la réaction de la classe politique ? En tout cas, il n’en fallait pas plus pour que lesdites  bénéficiaires descendent dans les rues pour disent-elles, pour soutenir Boni Yayi dans cette décision qu’elles qualifient d’opportune.

Les causes du rejet

En s’opposant à la ratification des accords de prêts introduits à l’Assemblée nationale par le gouvernement du Changement, les députés de la 5ème législature s’inscrivent dans la dynamique de verrouiller les sources de revenus du régime du Changement. Il faut dire que la gestion des fonds alloués aux microcrédits suscitait déjà assez de polémiques et beaucoup en viennent à se demander si les fonds issus de l’escorte sont entre temps devenus insuffisants. Rappelons que les ressources financières issues de la filière véhicules d’occasion étaient préalablement destinées à alimenter le secteur des microcrédits mais depuis, plus rien. Plusieurs observateurs de la chose politique soupçonnent même le fait que les fonds de l’escorte soient détournés à d’autres fins. Mieux, selon certains députés, une partie des fonds alloués aux microcrédits serait injectée dans les nombreuses actions de visibilité du prince du Changement qui apparemment s’est lancé dans une campagne précoce qui ne dit pas son nom.

Marche de soutien ou manipulation ?

A peine le chef de l’Etat prend une nouvelle ordonnance que certaines femmes descendent dans les rues pour à travers des marches le soutenir. Mais pour un béninois averti, il y a là un topo mal ficelé. A y voir de près, tout ceci pue de la manipulation des kilomètres à la ronde. Puisque le refrain qui soutien cette marche est suffisamment clair. Qu’il vous souvienne qu’au lendemain du rejet de ces projets, les caciques du pouvoir ont tôt fait d’entonner la chanson ‘’ On a obtenu de crédits qu’on veut distribuer aux pauvres et les députés refusent…’’. Et aujourd’hui les femmes  sont invitées à reprendre en chœur ce morceau savamment concocté pour livrer les élus du peuple à la vindicte ignorant peut-être qu’elles sont manipulées. Et comme il est désormais de coutume, ces sorties sont le plus souvent soutenues par quelques billets de banque. C’est donc un job rentable. En tout cas, on ne peut empêcher le béninois de s’exprimer, seulement, il convient de rappeler à ces ‘’marcheurs professionnels’’ qu’un prêt n’est pas un don. Tôt ou tard, le contribuable béninois le paiera.

Est-il opportun de prendre une ordonnance ?

Le vendredi dernier, le chef de l’Etat a, pour la nième fois, pris une ordonnance pour autoriser le  crédit destiné au microcrédit octroyé aux femmes, accord de crédit que le parlement avait rejeté. L’utilisation à outrance de cet article par le président de république, étonne plus d’un à telle enseigne que d’aucuns se demandent si le chef de l’Etat respecte les dispositions liées à la prise d’ordonnance. En effet, l’article 68 de la constitution  stipule que « Lorsque les institutions de la République, l'indépendance de la nation, l'intégrité du territoire national ou l'exécution des engagements internationaux sont menacées de manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et constitutionnels est menacé ou interrompu, le Président de la République, après consultation du Président de l'Assemblée Nationale et du Président de la Cour constitutionnelle, prend en conseil des Ministres les mesures exceptionnelles exigées par les circonstances sans que les droits des citoyens garantis par la constitution soient suspendus». Il est donc clair que c’est en cas de force majeur que le président fait  recours à cet article pour contrer des situations exceptionnelles pouvant conduire le pays dans le gouffre. Mais lorsque nous prenons le contexte actuel, il  est évident que l’intégrité du pays n’est aucunement menacée. La souveraineté de la nation non plus. Rien ne presse donc pour que le président soit obligé de faire recours à l’article 68 de la constitution. Après tout analyse, cette prise d’ordonnance, peut-être interprété comme  une violation de la constitution. S’il est vrai qu’il faut entretenir le programme Mccp qui fait son  petit bonhomme de chemin et améliore les  conditions de vie de quelques femmes, ce n’est pas une raison suffisante pour s’endetter une fois encore avec une décision dont les conséquences politiques pourraient s’avérer fatales.

 

La réaction de la classe politique

Le mardi 04 mai dernier au profit d’un vote en plénière, les députés de la 5ème législature ont été rejeté deux projets de ratification d’accords de prêts introduits par le gouvernement. 01voix pour, 44 contre et zéro abstention pour le premier texte et 01 voix pour, 42 contre et zéro abstention pour le second. Un rejet qui s’explique selon les députés par le fait qu’il n’y a pas de transparence dans la gestion des fonds déjà alloués aux micro-crédit et dans ces conditions, il ne serait pas réfléchi de leur part de ratifier encore d’autres accords de prêts pour les mêmes causes. Ne pouvant laisser cet accord de prêt de la Banque islamique de développement échapper au Bénin, le président Boni Yayi a pris une ordonnance le vendredi dernier pour ratifier lesdits accords. Cette ordonnance prise par le chef de l’Etat, la énième de son mandat est appréciée diversement par la classe politique. Si pour les députés de la mouvance présidentielle, cet acte posé par le prince du Changement est judicieux parce qu’il permettra d’augmenter les fonds alloués aux micro-crédits aux plus pauvres et donc sortir un bon nombre de femmes de la misère. Par contre, pour l’opposition, cette décision est non avenue et constitue une violation de la loi fondamentale du Bénin. Pour cause, elle estime que le chef de l’Etat abuse des prérogatives que lui confère l’article 68 de la loi fondamentale. A ce sujet, certains acteurs politiques ont demandé à Boni Yayi de faire attention dans sa gestion du pouvoir d’Etat s’il ne veut pas être poursuivi après son mandat.

 

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